L’abstention nous maintient dans le cercle vicieux du gouvernement de la minorité et entrave la construction démocratique du Maroc
Par Khaoula Lachguar
J’ai souhaité écrire ses lignes suite à l’émission « Face à Face » de France 24 en langue Arabe, à laquelle j’ai participé au nom de l’USFP face à Said Essakti représentant du parti Annahj qui appelle à la non-participation. Lors de cet échange j’ai écouté beaucoup de contre-vérités que j’ai rectifiées lors de l’émission et que je souhaite partager avec les lecteurs.
D’abord il faut assoir un principe de base, le parti Annahj a le droit d’afficher et d’exprimer ses positions politiques sur la place publique. C’est un parti légalement constitué et nul ne devrait l’empêcher ou entraver ses manifestations. Or le fait que les manifestations d’Annahj ont été violemment réprimées ne nous surprend pas vu que le gouvernement actuel a eu pour habitude de brimer violemment toutes les expressions qui le dérangent dans un abus clair de ses pouvoirs.
Ceci étant, est-il besoin de rappeler que l’USFP s’est construit à la base au tour du choix de la participation aux institutions pour construire la démocratie marocaine. Ce choix est inscrit de façon claire dans nos documents fondateurs depuis 1975. Nous sommes donc parfaitement opposés aux appels à la non-participation et estimons que cela dessert la cause démocratique.
En effet, tout changement ne peut s’opérer que de l’intérieur. D’ailleurs, notre parti n’a pas hésité à confronter le régime lors des années de plomb et les noms de nos militants sont légion dans le rapport de l’Instance Equité et Réconciliation. Ce combat n’a mené ni au changement du régime ni à l’éradication de notre parti. Bien au contraire il nous a confortés dans nos convictions de nécessité de la démocratisation du pays. C’est fort de ces convictions que nos leaders et à leur tête Abderrahim Bouabid et Omar Benjelloun ont créé l’USFP en 1975 et ont inscrit le choix de la lutte démocratique non violente dans nos principes.
Aujourd’hui, plus de 40 ans après, nul ne peut nier les améliorations en termes de libertés publiques et de droits de l’homme mais également en terme de processus électoral. Nous sommes conscients que l’objectif de la « Monarchie Parlementaire » n’est pas encore atteint, mais en même temps nous considérons que le changement ne peut arriver que progressivement. Les avancées enregistrées jusqu’au dernier amendement de la constitution en 2011 sont le fruit des combats menés par les militants USFP à l’intérieur de l’hémicycle. C’est d’ailleurs, ce combat qui a permis de reconnaitre le droit au parti Annahj de se constituer légalement grâce aux pressions du groupe USFP sur le ministère de l’intérieur.
Les arguments de mon contradicteur se focalisaient sur une négation totale de toutes avancées sur quelque plan que ce soit. Ce qui est en soit trop réducteur pour être un argument sérieux. Notamment la prétendue prééminence des pouvoirs de la monarchie alors que la constitution est disponible et tout citoyen peut se rendre compte qu’il y a un transfert total des pouvoirs législatifs vers le parlement et un transfert des pouvoirs exécutifs au chef du gouvernement en dehors des affaires étrangères et du commandement de l’armée. Donc si régression il y a, elle est du fait des comportements du chef de gouvernement M. Benkirane qui n’assume pas son rôle par manque de volonté politique et d’aptitude au travail.
De façon chiffrée, si on considère une circonscription de 100.000 inscrits sur les listes électorales qui correspond à trois sièges au parlement, les deux dernières échéances montrent qu’un candidat ayant obtenu 8.000 voix est assuré de rejoindre l’hémicycle. C’est un scandale, c’est justement le gouvernement de la minorité. Seule la participation massive peut brouiller les pistes et entraver les magouilles des mafias des élections. Que ce soit ceux qui achètent les voix où ceux qui font de la charité et tiennent à maintenir les gens dans la pauvreté et l’ignorance pour mieux justifier cette charité.
Par ailleurs, l’impact d’un choix politique de non-porticipation aux élections est impossible à mesurer puisque le taux de participation est déjà très faible. Le plus souvent, les gens ont simplement la flemme d’y aller, trouvent que la politique ne sert à rien, voire sont en fait anti-démocratie et préfère que le pays soit géré par un seul homme.
Enfin, concernant une soi-disant bipolarité du champ politique marocain, il faut savoir que parler de troisième voie donne du crédit à la théorie de la bipolarité PAM/PJD. Théorie qui trouvent sa source en partie dans les dernières élections communales, dont l’USFP a rejeté les résultats. Au sein de notre partie, nous croyons en l’existence de deux projets sans troisième voie possible, un projet conservateur et rétrograde, et un projet démocratique et moderne représenté par la gauche et à sa tête l’USFP en tant que plus grand parti de gauche.
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